DCB/DBC Mobile beta
+

Dans le cadre de l’accord de financement entre le Dictionnaire biographique du Canada et le Musée canadien de l’histoire, nous vous invitons à participer à un court sondage.

Je veux participer maintenant.

Je participerai plus tard.

Je ne veux pas participer.

J’ai déjà répondu au sondage

Nouvelles du DBC/DCB

Nouvelles biographies

Biographies modifiées

Biographie du jour

LESAGE, DAMASE – Volume XV (1921-1930)

né le 28 mars 1849 à Sainte-Thérèse-de-Blainville (Sainte-Thérèse, Québec)

La Confédération

Le gouvernement responsable

Sir John Alexander Macdonald

De la colonie de la Rivière-Rouge au Manitoba (1812–1870)

Sir Wilfrid Laurier

Sir George-Étienne Cartier

Sports et sportifs

Les fenians

Les femmes dans le DBC/DCB

Les conférences de Charlottetown et de Québec en 1864

Les textes introductifs du DBC/DCB

Les Acadiens

Module éducatif

La guerre de 1812

Les premiers ministres du Canada en temps de guerre

La Première Guerre mondiale

GIROUARD, sir ÉDOUARD PERCY CRANWILL, ingénieur militaire, constructeur de chemins de fer, administrateur colonial, fonctionnaire et industriel, né le 26 janvier 1867 à Montréal, fils de Désiré Girouard*, avocat, et d’Essie Cranwill ; le 10 septembre 1903, il épousa à Pretoria (Tshwane, Afrique du Sud) Mary Gwendolen Solomon (décédée en 1916), et ils eurent un fils ; divorcé en 1915 ; décédé le 26 septembre 1932 à Londres.

Pendant son enfance, Édouard Percy Cranwill Girouard vécut dans diverses résidences du quartier chic de Montréal qui se développa le long de la rue Sherbrooke, entre les rues Aylmer et Peel, pendant le dernier quart du xixe siècle. Il étudia à la maison dans un environnement bilingue jusqu’à l’âge de dix ans, puis fréquenta le petit séminaire de Montréal en 1877–1878 ; il ne termina toutefois pas l’année scolaire suivante, car sa mère mourut au printemps de 1879. À l’automne de cette année-là, Édouard Percy Cranwill, une sœur aînée et un frère cadet furent envoyés dans des pensionnats ; leur père, qui, après un dépouillement judiciaire, avait été déclaré élu sous l’étiquette conservatrice dans la circonscription fédérale de Jacques-Cartier, passerait la plupart de son temps à Ottawa. Édouard Percy Cranwill alla au séminaire de Saint-Joseph des Trois-Rivières. Même si son rendement scolaire passa du niveau « assez bien » à « excellent » au cours des trois années suivantes, ses camarades de classe garderaient surtout de lui le souvenir du « petit blond » plein de ressources, de son enthousiasme pour la géographie et de ses travaux d’ingénierie éphémères construits sur le terrain de jeux dans la neige fondante printanière.

En 1882, Girouard décida impulsivement de devenir soldat et choisit le Royal Military College of Canada (RMC) à Kingston, en Ontario, malgré le fait que seuls trois Canadiens français y avaient été acceptés depuis l’inauguration, en 1876. Les candidats qui n’avaient pas fait leurs études en anglais trouvaient les examens d’admission extrêmement difficiles. À sa première tentative, Girouard échoua, mais grâce à l’intervention de son père auprès de son ami et collègue Adolphe-Philippe Caron*, ministre de la Milice et de la Défense, on lui permit de passer un examen supplémentaire. Même si ses notes en mathématiques étaient toujours faibles, il entra au RMC en tant que cadet 147 à l’automne de 1882.

Le RMC donnait un programme de génie solide, conçu en grande partie par son commandant fondateur, le colonel Edward Osborne Hewett*, et mis en vigueur par le professeur Robert Carr-Harris, qui enseigna le génie civil de 1879 à 1897. La toute petite armée canadienne permanente ne pouvait accueillir que quelques cadets du RMC et seulement quatre postes d’officiers leur étaient offerts annuellement dans l’armée britannique régulière. La plupart des diplômés trouvaient donc des débouchés dans les industries mécaniques et minières. Les aptitudes aux études de Girouard s’améliorèrent constamment : en 1885–1886, il était premier de sa classe. Un poste dans le génie royal lui échappa quand il reçut son diplôme au printemps. Jalonneur dans une équipe d’arpentage du chemin de fer canadien du Pacifique l’été précédent, il devint dessinateur technique sur la « Short Line », liaison ferroviaire entre Montréal et Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, et travailla à Greenville, dans le Maine, jusqu’en 1888. Cet été-là, il réussit, en exerçant des pressions, à obtenir l’un des postes supplémentaires que le génie royal réservait à d’anciens diplômés du RMC.

Pendant les deux années suivantes, Girouard participa au programme d’entraînement des officiers à la School of Military Engineering de Chatham, en Angleterre, où son expérience dans la construction de chemins de fer et sa façon de chanter le refrain d’Alouette avec entrain attirèrent l’attention. Il bénéficia d’un congé spécial pour établir un projet de défense côtière de l’Angleterre qui préconisait des canons navals montés sur des wagons ferroviaires qu’on déplacerait sur les lignes existantes ; en avril 1891, il exposa les grandes lignes de son plan dans une conférence à la Royal United Services Institution de Londres qui, plus tard cette année-là, publierait son texte et la discussion subséquente. Nommé directeur du trafic du Royal Arsenal Railway en juillet 1890, il supervisa pendant cinq ans tous les aspects du réseau, même si celui-ci était de dimension plutôt restreinte, et se plongea dans l’étude méthodique de l’histoire des chemins de fer militaires. Le 28 juillet 1891, il fut promu lieutenant.

En 1895, sir Horatio Herbert Kitchener, commandant en chef britannique de l’armée égyptienne, réclama les services de Girouard, mais le ministère de la Guerre l’avait affecté à l’île Maurice. Quand une expédition pour envahir Dongola, dans le nord du Soudan, fut annoncée en 1896, première étape en vue de reprendre le pays perdu par les Britanniques et les Égyptiens en 1885, Girouard obtint la permission de se joindre à Kitchener. On lui confia la tâche de réparer le chemin de fer et de le prolonger de 203 milles le long du Nil, de Ouadi Halfa jusqu’à Dongola. Les réalisations de Girouard lui valurent le titre de compagnon de l’ordre du Service distingué. L’année suivante, sa réputation de leader de la « bande de garçons » de Kitchener, groupe de jeunes officiers compétents réunis par leur commandant, se consolida quand il réussit, dans des conditions difficiles, la construction rapide de la voie ferroviaire reliant Ouadi Halfa à Abou Hamed sur une distance de 235 milles en direction sud-est, à travers le désert de Nubie. La route éliminait l’obligation de parcourir 500 milles en bateau et de traverser trois des cinq cataractes du Nil, trajet qui s’était avéré si pénible pour le général Garnet Joseph Wolseley* et les voyageurs canadiens dans l’expédition infructueuse organisée pour prêter main-forte au major-général Charles George Gordon à Khartoum, en 1884–1885.

La construction du chemin de fer du désert se poursuivit, mais les lignes égyptiennes commencèrent à souffrir de la lourdeur du trafic en direction du Soudan. En 1898, on envoya donc Girouard améliorer le tronçon près de Louksor. Ses travaux attirèrent l’attention de lord Cromer, gouverneur britannique de l’Égypte, qui lui offrit la présidence de l’Egyptian Railways Board, assortie du mandat de restructurer le réseau au grand complet et de mettre fin à l’encombrement au port d’Alexandrie. Girouard entra en fonction au Caire en juin, avec le grade temporaire de major, et apporta des changements profonds au sein du personnel ; en moins de quelques mois, il avait produit un programme de travaux ferroviaires et portuaires qui serait ensuite fidèlement suivi pendant 20 ans. Il était donc absent à la bataille d’Omdourman, près de Khartoum, le 2 septembre 1898, quand les troupes de Kitchener triomphèrent, en grande partie grâce à leur capacité de déplacer les hommes et les approvisionnements.

En 1899, Girouard devint une célébrité dans tout l’empire après la parution de deux livres sur la campagne du Soudan. Dans The river war, Winston Churchill, qui avait servi dans la cavalerie britannique et comme correspondant de guerre, peignit un portrait convaincant de l’ingénieur « à qui tout était confié ». Girouard avait planifié l’ensemble des détails du futur chemin de fer dans un épais carnet, afin que « les équipes de travail ne soient jamais retardées par manque [de matériel], ne fut-ce qu’un fil de cuivre ». Un autre correspondant de guerre britannique, George Warrington Steevens, mit en relief l’irrévérence coloniale de Girouard envers l’autorité dans With Kitchener to Khartum. « Il est reconnu comme étant le seul homme de l’armée égyptienne à n’avoir nullement peur du sirdar [Kitchener]. » S’adressant à un lectorat dévoué à l’Empire, Steevens décrivit Girouard comme un mélange « d’imagination audacieuse française, d’ingénuité américaine et de ténacité anglaise dans l’exécution ». Quand Girouard séjourna à Montréal en septembre 1899, les autorités militaires canadiennes, qui pressentaient une guerre avec l’Afrique du Sud, furent enchantées d’organiser un banquet à l’hôtel Windsor en l’honneur du héros militaire canadien-français.

À son retour en Angleterre, en octobre 1899, Girouard fit valoir auprès du ministère de la Guerre que les chemins de fer de la colonie du Cap étaient trop complexes pour être pris en charge par l’armée régulière pendant une campagne. Comme résultat, il fut nommé directeur des chemins de fer pour les troupes britanniques en Afrique du Sud. Déjà capitaine et major honoraire, il reçut le grade local de lieutenant-colonel. Son personnel s’élargit avec l’arrivée des diplômés du RMC Herbert Colborne Nanton et Henri-Gustave Joly de Lotbinière, et de plusieurs membres de la « bande de garçons ». Girouard réussit à créer un équilibre délicat entre le maintien des activités ferroviaires civiles et les besoins militaires en matière de transport des soldats et des munitions des ports sud-africains jusqu’au front. Sous sa gouverne, la reconstruction rapide des lignes endommagées et la construction de déviations novatrices en contrebas des ponts détruits permirent la circulation rapide des marchandises et du personnel sur les lignes prises à l’ennemi dans la colonie du fleuve Orange et le Transvaal, et assura l’avance rapide des troupes de lord Roberts en 1900. Pendant la phase exaspérante de guérilla après les combats conventionnels, Girouard assuma la direction des Imperial Military Railways et fut responsable de toutes les lignes ferroviaires de l’Afrique du Sud, excepté celles du Natal. En avril 1901, il reçut le titre de chevalier commandeur de l’ordre de Saint-Michel et Saint-Georges.

En 1902, Girouard fut nommé commissaire des Central South African Railways. Travaillant en marge du « Kindergarten », club informel de jeunes administrateurs coloniaux recrutés par le haut-commissaire [V. John Buchan] pour l’Afrique du Sud, lord Milner, il conçut des plans ambitieux pour cette société : remplacer le matériel roulant vieillissant, ajouter plusieurs trains de luxe et prolonger la ligne permanente. L’année suivante, il épousa Mary Gwendolen Solomon, âgée de 20 ans, enfant unique de sir Richard Prince Solomon, procureur général du Transvaal et conseiller principal de lord Milner en matière de constitution. Son prestige fut de nouveau confirmé quand, en 1903, le Montreal Daily Herald le classa septième dans un sondage sur les « plus grands hommes vivants » du Canada, mais son étoile déclina à peine six mois plus tard. En 1904, une récession économique au Transvaal interrompit les projets d’expansion ferroviaire et les randlords, groupe de propriétaires de mines capitalistes à Johannesburg, s’acharnèrent contre les coûts croissants de la gestion des chemins de fer. Administrateur colonial de langue française non issu du système public d’éducation – contrairement à beaucoup de membres du « Kindergarten » de Milner – et, de surcroît, rescapé de l’administration militaire britannique, Girouard constituait une cible prévisible. Il était déterminé à protéger les chemins de fer contre les intérêts à court terme des propriétaires miniers, comme il avait mis les opérations ferroviaires à l’abri des généraux importuns pendant la guerre. Sûr de pouvoir compter sur le soutien de lord Milner, il ne vit pas que la scène politique se modifiait. Son attitude parfois cavalière envers les méthodes comptables et le ton irritable qu’il adopta pour se défendre publiquement décidèrent de son sort. Cédant aux pressions, Milner lui demanda sa démission. Quelque peu humilié, Girouard retourna en Angleterre où, après un congé de six mois avec rémunération, il s’établit à Londres, comme membre du personnel de lord Methuen, chef du commandement territorial de l’Est. Dix-huit mois plus tard, il fut nommé adjoint au quartier-maître général du commandement de l’Ouest, basé à Chester, en Angleterre.

Les perspectives d’avenir de Girouard s’améliorèrent quand Churchill, sous-secrétaire d’État aux Colonies, facilita sa nomination pour remplacer sir Frederick John Dealtry Lugard comme haut-commissaire du Nigeria du Nord en février 1907 (son titre changerait pour celui de gouverneur en mai 1908). La sécurité militaire et la promesse de produire du coton dans la colonie britannique la plus populeuse de l’Afrique exigeaient un système de transport solide. Girouard fut mandaté pour construire la ligne de chemin de fer Baro-Kano de 366 milles qui donnerait à l’ancien Hausaland un accès au fleuve Niger. Il implanta des politiques qui seraient connues sous le nom de « gouvernance indirecte » (administration par les chefs indigènes), avant même que Lugard les ait formulées complètement. Préoccupé par la possibilité que le chemin de fer amène un flot de spéculateurs fonciers et sape les droits d’une vaste population autochtone, Girouard joua un rôle de premier plan dans la création du Northern Nigerian Lands Committee, qui se réunit à Londres en 1908. La Land and Native Rights Proclamation de 1910, reposant sur le rapport du comité, donna forme aux idées principales que Girouard avait préconisées, notamment que les droits autochtones à toutes les terres et, par conséquent, à leurs fruits ne pourraient pas être aliénés. Des critiques modernes ont soutenu que même si les politiques de Girouard renforcèrent les autorités africaines traditionnelles et empêchèrent l’établissement de la propriété foncière privée, elles étaient paternalistes et firent obstacle à la modernisation des structures féodales, retardant ainsi l’émergence du capitalisme et le développement du Nigeria du Nord.

Par sa personnalité énergique et sa connaissance des questions ferroviaires et foncières, Girouard représentait le candidat idéal pour le poste de gouverneur de l’Est-Africain britannique (Kenya) ; sa nomination fut annoncée le 2 août 1909. L’achèvement, en 1903, du chemin de fer de l’Ouganda, qui reliait Mombasa, sur la côte de l’océan Indien, au lac Victoria, avait provoqué un bouleversement social dans ce protectorat et les gouverneurs s’y étaient succédé sans pouvoir concilier les exigences concurrentes de colons européens, d’immigrants asiatiques et de populations indigènes. Girouard arriva à Nairobi en septembre 1909. Comme il était trop tard pour effacer une décennie de colonisation par des Blancs, il fut forcé, en tant que colon lui-même, d’examiner sérieusement les griefs de ces derniers. Son dynamisme et son charme suscitèrent d’abord beaucoup d’optimisme dans toutes les sections de la colonie jusqu’à ce qu’un conflit territorial éclate.

En 1904, un traité conclu avec les nomades massaïs avait divisé les clans en leur attribuant deux réserves distinctes, mais les colons avides de terres et les Massaïs qui en avaient besoin continuèrent leurs affrontements, en particulier sur le plateau fertile de Laikipia, au nord du chemin de fer. Girouard prônait la réunification de tous les Massaïs sur une réserve agrandie au sud du chemin de fer et persuada les clans massaïs du nord de se déplacer. Cependant, craignant que les colons ne s’emparent des terres, le ministère des Colonies ordonna à Girouard, en avril 1910, de mettre fin à cette entreprise sous prétexte qu’elle violait le traité de 1904. Girouard clarifia la situation au cours d’un séjour à Londres en 1911. Il conçut alors une structure qui reflétait le paysage politique et négocia un nouveau traité avec les Massaïs. Le ministère des Colonies accepta d’agrandir la réserve, mais l’opération de déplacement dut être retardée. Les Massaïs en souffrirent énormément, tandis qu’à Londres, des soupçons persistaient quant à l’implication de colons blancs dans ces événements. La position de Girouard devint de plus en plus intenable quand il perdit la confiance du secrétaire d’État aux Colonies, Lewis Harcourt. En juillet 1912, il démissionna brusquement du service des colonies et de l’armée. Il accepta alors une offre à laquelle il avait réfléchi pendant un an : se joindre à l’entreprise Sir W. G. Armstrong, Whitworth and Company Limited, fabricant important de matériel de guerre, de locomotives, de bateaux, d’avions et d’automobiles.

Girouard passa les deux années suivantes en qualité de directeur général des grands travaux pour cette compagnie dans le quartier d’Elswick, à Newcastle upon Tyne, en Angleterre. Au déclenchement de la Première Guerre mondiale, en 1914, Kitchener lui demanda d’agir comme conseiller pour les questions ferroviaires sur le front de l’Ouest. En avril 1915, il démissionna de la firme pour éviter un conflit d’intérêts, et consacra plus de temps aux problèmes de munitions et de main-d’œuvre industrielle pour le ministère de la Guerre. Lorsque le ministère des Munitions fut créé, en juin 1915, Girouard fut nommé directeur général de l’approvisionnement en munitions. Peut-être ajouta-t-il foi aux articles de journaux qui l’avaient surnommé l’homme « push and go » que recherchait le ministre, David Lloyd George. Girouard était le modèle parfait du pan-impérialiste, comme le faisait remarquer le Times de Londres en rapportant son discours prononcé devant des ouvriers aux munitions le 12 juin 1915. « Sir Percy Girouard […] dit qu’il était là comme sujet britannique [et] Canadien français. Pendant 250 ans, ses ancêtres avaient résidé au Canada […] Ils avaient vécu heureux sous le drapeau britannique, avec la religion catholique, la langue française, l’ancien code Napoléon et la loi prénapoléonienne, sans difficulté et avec beaucoup de tolérance. Était-il si étonnant alors que les Canadiens français […] aient tous ressenti ce que cela signifierait pour eux, pour l’Empire dans son ensemble et pour le monde entier si quoi que ce soit venait à bouleverser l’équilibre de liberté que l’Empire représentait [?] »

Le ministère avait été créé en réaction à la crise des obus de 1915, quand on se rendit compte que le gouvernement de Herbert Henry Asquith n’avait pas fourni les munitions nécessaires au front de l’Ouest. L’intérêt de Lloyd George à disperser des contrats parmi de nouveaux entrepreneurs industriels était en conflit avec le point de vue de Girouard selon lequel il faudrait inciter les armuriers traditionnels à atteindre des niveaux de production plus élevés, ce qui engendra des frictions intenses entre les deux fortes personnalités. Six semaines seulement après la création du ministère, Girouard fut obligé de partir et reprit son travail à la Sir W. G. Armstrong, Whitworth and Company Limited.

La restructuration de l’entreprise après la guerre entraîna des batailles de conseil ; Girouard démissionna brusquement en janvier 1920, pour revenir à peine deux mois plus tard. En 1922, un groupe d’hommes d’affaires londoniens, avec l’appui du ministre des Affaires étrangères et du Department of Overseas Trade, le mirent à la tête du processus d’acquisition d’une vaste concession de 50 millions d’acres, assortie de droits miniers et d’avantages fiscaux, que le gouvernement du Pérou offrait en échange de la construction d’un chemin de fer de 1 864 milles qui serait réalisée par la Sir W. G. Armstrong, Whitworth and Company Limited. Ce fut plutôt un consortium américain, dirigé par le Canadien Robert William Dunsmuir, qui obtint le contrat en 1923, et Girouard quitta définitivement l’entreprise.

La vie personnelle de Girouard avait été rudement éprouvée à partir de 1910, alors que son mariage commença à s’effriter. En 1914, sa jeune femme demanda le divorce sous le prétexte, certainement monté de toutes pièces, d’adultère. Après la prononciation du divorce, au début de 1915, elle se rendit en Égypte pour épouser le capitaine Robert William Oppenheim, dont elle avait fait la connaissance dans l’Est-Africain britannique quand Girouard en était le gouverneur. Quand Oppenheim fut affecté à la campagne de Gallipoli, elle retourna en Angleterre et, en 1916, mourut en donnant naissance à des jumeaux qui ne survécurent pas. La vie de Girouard devint quelque peu plus ordonnée en 1922 quand une nièce, Virginia Cranwill Skynner, arriva de Winnipeg pour tenir sa maison en Angleterre ; les huit années qu’ils vécurent ensemble au Holborough Cottage, dans le Kent, pendant qu’il participait à des opérations liées au ciment Portland, furent parmi les plus paisibles de son existence.

En 1930 et 1931, Girouard effectua deux séjours d’affaires prolongés en Colombie, en Amérique du Sud, comme conseiller dans des projets de cimenteries et de chemins de fer ; ces voyages ébranlèrent sa santé. Des problèmes à la prostate et aux voies urinaires se compliquèrent après une rupture d’appendice qui, malgré une intervention chirurgicale, entraîna sa mort le 26 septembre 1932. Il laissa dans le deuil son fils Richard Désiré Girouard et son petit-fils Mark Girouard, qui deviendrait écrivain et historien de l’architecture britannique.

Sir Édouard Percy Cranwill Girouard était un homme doté d’une énergie sans bornes, un maître du détail et un novateur brillant qui vivait difficilement avec la contrainte de l’autorité et des conventions, et qui parfois perdait de vue des réalités politiques importantes. Partout où il travailla, toutefois, il inspira une profonde loyauté chez tous ceux qui étaient en service avec lui, et la construction du chemin de fer militaire du Soudan, d’une longueur de 588 milles, au rythme de 1,17 mille par jour à travers le désert de Nubie, reste l’une des réalisations d’ingénierie les plus remarquables de l’ère victorienne.

Michael Lawrence Smith

Sir Édouard Percy Cranwill Girouard est l’auteur de « The use of railways for coast and harbour defence », Royal United Services Instit., Journal (Londres), 35 (1891) : 631–644 ; History of the railways during the war in South Africa, 1899–1902 (Londres, 1903) ; « Railways in war », Royal Engineers Journal (Chatham, Angleterre), [nouv. sér.], 2 (1905–1906) : 16–27 ; « The railways of Africa », Scribner’s Magazine (New York), 39 (1906) : 553–568 ; « Communication services », Royal Engineers Journal, [nouv. sér.], 3 (1906–1907) : 69–79 ; « The development of Northern Nigeria », African Soc., Journal (Londres), 7 (1907–1908) : 331–337 ; « The Sudan Military Railways in 1896–1898 », dans The story of the Cape to Cairo railway & river route from 1887 to 1922, Leo Weinthal et al, compil. (5 vol., Londres, [1923–1926]), 2 : 327–334.

Arch. privées, Mark Girouard (Londres), Corr. de lady Girouard ; E. P. C. Girouard, « Duty and reflections in Africa » (cahier de notes, s.d.), « Egypt and the Sudan » (texte dactylographié, s.d.), « The imperial ideal » (ms, s.d.) ; Mrs Virginia Robinson (Victoria), Corr. de sir E. P. C. Girouard à V. C. Skynner, 1930–1932.— BAC, R2396-3-0 ; R6169-0-4.— National Arch. (G.-B.), CO 446/57–CO 446/85 ; CO 533/62–CO 533/109.— Tyne and Wear Arch. (Newcastle upon Tyne, Angleterre), D.VA ; DS.REN.— « Sir Wilfrid, Strathcona, Sir Charles head the list of Canada’s greatest living men in voting contest », Montreal Daily Herald, 7 nov. 1903.— Christopher Addison, Four and a half years : a personal diary from June 1914 to January 1919 (2 vol., Londres, [1934]) ; Politics from within, 1911–1918 : including some records of a great national effort (2 vol., Londres, 1924).— R. B. D. Blakeney, « K. and Gerry : railways in war time », National Rev. (Londres), 106 (1935–1936), no 636 : 86–94.— Mary Bull, « Indirect rule in Northern Nigeria, 1906–1911 », dans Essays in imperial government presented to Margery Perham, K. [E.] Robinson et Frederick Madden, édit. (Oxford, Angleterre, 1963).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— W. [L. S.] Churchill, The river war : an historical account of the reconquest of the Soudan, F. [W.] Rhodes, édit. (2 vol., Londres, 1899).— G.-B., Ministry of Munitions, History of the Ministry of Munitions (12 vol., [Londres, 1922]).— A. J. Kerry et W. A. McDill, The history of the Corps of Royal Canadian Engineers (2 vol., Ottawa, 1962–1966), 1.— A. H. M. Kirk-Greene, « Canada in Africa : Sir Percy Girouard, neglected colonial governor », African Affairs (Oxford), 83 (1984) : 207–239.— G. H. Mungeam, British rule in Kenya, 1895–1912 : the establishment of administration in the East Africa Protectorate (Oxford, 1966).— R. A. Preston, Canada’s RMC : a history of the Royal Military College (Toronto, 1969).— E. W. C. Sandes, The Royal Engineers in Egypt and the Sudan (Chatham, 1937).— R. W. Shenton, The development of capitalism in Northern Nigeria (Londres, 1986).— M. L. Smith, « Sir Percy Girouard : French Canadian proconsul in Africa, 1906–1912 » (mémoire de m.a., McGill Univ., Montréal, 1989).— Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell).— G. W. Steevens, With Kitchener to Khartum (Édimbourg et Londres, 1898).

Bibliographie générale

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Michael Lawrence Smith, « GIROUARD, sir ÉDOUARD PERCY CRANWILL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/girouard_edouard_percy_cranwill_16F.html.

Information à utiliser pour d'autres types de référence bibliographique


Permalien: http://www.biographi.ca/fr/bio/girouard_edouard_percy_cranwill_16F.html
Auteur de l'article:    Michael Lawrence Smith
Titre de l'article:    GIROUARD, sir ÉDOUARD PERCY CRANWILL
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2018
Année de la révision:    2018
Date de consultation:    28 mars 2024